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Sénégal : WSIGAD, une initiative qui encourage les filles à s’orienter vers les sciences


Depuis 2020, « Women STEM Inspiring girls for Africa’s Development » (WSIGAD) organise des webinaires, des workshops de formations, des talk shows… pour encourager les lycéennes du Sénégal à s’intéresser et à s’orienter davantage vers des filières scientifiques. L’initiative, portée par des étudiantes et diplômées de l’Institut Africain des Sciences Mathématiques (AIMS), ambitionne de s’étendre sur toute l’Afrique.

C’est à l’initiative de Balbine Olive Mboua Etoga, informaticienne camerounaise, ancienne étudiante en Master 2 en « Big data » de AIMS, établie au Sénégal, que WSIGAD voit le jour en 2020. Constituée d’étudiantes et d’anciennes diplômées d’AIMS originaires de différents pays d’Afrique, l’association est marrainée par Ndèye Niang,  enseignante-chercheure en statistique au Cnam (Paris) et intervenant comme enseignante à AIMS. L’objectif de l’association : promouvoir les Sciences Technologies Ingénierie Mathématiques (STEM) auprès des filles africaines.

C’est parti d’un conseil de Ndèye Niang, enseignante de Balbine, ainsi que sa marraine au sein de l’Association des femmes mathématiciennes du Sénégal, que la jeune Camerounaise, étudiante à l’époque à AIMS, décide de créer l’association. C’est en 2016, lors de sa participation à la 2eédition de la Journée « Filles et sciences : une équation lumineuse » au Sénégal, que Ndèye Niang constate l’intérêt des jeunes lycéennes pour cette journée. Un programme organisé par  l’Association des femmes ingénieures informaticiennes du Sénégal (SenChix) et l’Association Africaines des Femmes mathématiciennes du Sénégal (AWMA), dans le but d’inciter les élèves de 3e, seconde, Première, Terminale, les étudiantes en premier cycle universitaire, à choisir des filières scientifiques, surtout les maths et l’informatique et d’encourager les étudiantes à y rester. Une rencontre au cours de laquelle, les élèves et étudiantes échangent avec des femmes scientifiques modèles ; découvrent les débouchés offerts par les études de mathématiques, d’informatique et de technologie.

Se souvenant de cet intérêt, elle en fait part à sa filleule. «Nous avions remarqué que les petites filles étaient très intéressées par cette journée. C’est ainsi que j’ai dit à Balbine, que je trouvais que ce serait bien si elle pouvait le faire de manière plus régulière », confie Ndèye Niang à Africa Women Experts.

L’idée est aussitôt bien reçue par la jeune Camerounaise, qui avoue au passage qu’elle y pensait déjà depuis plusieurs années. « J’avais déjà cette hargne en moi. Je n’avais que des idées ; je n’avais pas de soutien et une personne qui pouvait me dire que c’est une bonne idée. Quand le professeur m’en a parlé, je n’ai pas hésité. Je me suis dit qu’il faut faire quelque chose », confie-t-elle à Africa Women Experts.

Ancienne employée de la Cameroon Youth School Tech Incubator (CAYSTI), une start-up créée par Arielle Kitio qui initie les enfants de 7 à 14 ans à la programmation, Balbine parvient en quelque temps à rassembler ses camarades d’AIMS. Celles-ci élisent un bureau, trouvent un nom, créent un logo, une page sur les réseaux sociaux, et l’association voit officiellement le jour en septembre 2020.

Faire découvrir l’application des STEM dans le quotidien

             

Domiciliée au Sénégal, l’association mène des activités de sensibilisation auprès des collégiennes et lycéennes dans le pays. En Mars 2021, l’association organise un webinaire sur « l’impact des STEM dans le développement de l’Afrique : enjeux et défis ». En août dernier, elle tient un 2e webinaire au cours duquel elle invite de jeunes femmes scientifiques africaines à partager leur expérience dans le domaine de l’Intelligence Artificielle et de la robotique afin d’inspirer les filles africaines.

Mais l’activité phare de l’association reste l’organisation des workshops de formation, un programme particulièrement apprécié par les lycéennes et collégiennes qui découvrent de manière concrète les STEM. D’ailleurs, Balbine se souvient avec beaucoup de satisfaction, du dernier workshop de formation organisé en février dernier, à l’occasion de la Journée internationale des femmes et filles de science célébrée le 11 février, en partenariat avec Orange Digital Center Sénégal. Une activité où les filles ont découvert l’outil informatique et ont été initiées au codage.« Lors de cette journée, nous avons formé une vingtaine de jeunes filles. Certaines découvraient l’ordinateur pour la première fois. Elles étaient émerveillées au point où, quand nous sommes rentrées, on les a confiées à Orange pour rentrer, mais elles n’étaient pas prêtes de rentrer. Ce qui témoigne de la satisfaction et de l’intérêt », confie-t-elle.

A l’avenir, l’association compte diversifier ses activités, en organisant, entre autres des minis compétitions, des olympiades … pour primer les gagnantes et les inciter ainsi à s’intéresser aux STEM. Elle compte aussi organiser des visites en entreprises avec des lycéennes pour qu’elles voient comment s’appliquent les STEM dans le quotidien. Et pourquoi pas, montrer aussi de manière ludique, comment les mathématiques peuvent être utiles. « En Afrique, nous avons plusieurs jeux comme l’Awalé, qui sont en réalité les mathématiques. On pourrait mettre ces jeux entre les mains des jeunes et leur demander d’imaginer un algorithme »,explique Ndèye Niang.

L’association ambitionne aussi de délocaliser ses activités dans d’autres pays, comme le Cameroun, le Nigéria, la Côte d’Ivoire où elle est déjà présente. Et plus tard, s’étendre dans tous les pays africains, pour impacter plus de filles.

Inciter les filles à ne pas s’autocensurer

Convaincues de la valeur ajoutée de l’association dans la vie des collégiennes et lycéennes africaines,  les membres de l’association pensent qu’aujourd’hui, il est vraiment important d’encourager les filles à ne pas s’autocensurer. « Parfois, elles peuvent s’autocensurer juste parce qu’elles n’ont pas de modèles ou qu’il y’a des stéréotypes, comme quoi les études scientifiques sont compliquées, qu’elles n’auront pas de mari, que les hommes auront peur d’elles… », explique Ndèye Niang. D’ailleurs, pour l’enseignante-chercheure, cette sensibilisation devrait commencer beaucoup plus tôt, notamment au primaire, pour que l’impact soit plus considérable.

De même, souligne-t-elle, les parents et familles doivent être sensibilisées si l’on veut voir plus de filles s’orienter vers des filières scientifiques.« On peut faire tout ce que l’on veut au niveau de l’école, mais si au sein de la famille rien n’est fait, cela ne servira à rien. Il faut sensibiliser les parents, pas seulement les mères, surtout les pères. Il faudrait que les deux parents soient d’accord», confie-t-elle. Sans oublier une réforme de certains manuels qui véhiculent encore des stéréotypes entre filles et garçons en Afrique.

Braver le défi du manque de matériels

Au-delà des ambitions de l’association, Balbine et ses camarades doivent composer avec la réalité du terrain pour intéresser les filles aux STEM. L’un des principaux défis étant le manque de matériels. « Nous avons été sollicitées par une école au Sénégal pour y organiser une journée d’orientation. L’établissement nous a précisé qu’ils n’ont pas de salle informatique. Donc, tout devrait se faire à nos propres frais : nous devrons chercher des machines… »,explique -t-elle. D’où le besoin de sponsors pour soutenir les activités de l’association.

Une autre contrainte est liée à l’approche genre dans les activités de WSIGAD, qui pourrait ne pas rencontrer forcément l’adhésion de certains responsables d’écoles. « Dans certaines écoles, nous risquons d’être confrontées au fait que les responsables ne voudront pas qu’on forme seulement les filles alors que les garçons sont en cours »,souligne-t-elle.

En dépit de ces obstacles, WSIGAD reste plus que déterminée à révéler davantage de filles scientifiques en Afrique. En phase avec l’actualité, l’association organisera sa prochaine activité le 12 mai, journée internationale de la femme mathématicienne. L’occasion de dénicher et d’inspirer plus de futures scientifiques africaines.

 

Danielle Engolo