Guitariste basse, Islam Elbeiti casse les codes au Soudan. A 27 ans, cette jeune musicienne, qui est aussi présentatrice radio et actrice, milite pour le changement social dans son pays. En plus de sa casquette d’artiste, elle est aussi entrepreneure. Elle est, notamment la co-fondatrice de « Sudanese entrepreneurship and innovation network » (SIEN) qui vise à faciliter le développement de l’éducation informelle en Afrique à travers les musiques du monde. Récemment, Avance Media l’a classée parmi les 100 Jeunes Africains les plus influents d’Afrique.
A travers la musique, Islam Elbeiti milite pour plus de droits en faveur des femmes, notamment des musiciennes au Soudan. Née dans une famille passionnée de musique, elle s’attache très tôt aux rythmes musicaux, sons et accords. Ayant vécu son enfance dans différents pays, notamment le Soudan, l’Ethiopie, la République Démocratique du Congo, la Chine, elle a la possibilité de découvrir la musique dans toute sa diversité, à un moment où dans son pays, la musique est presque bannie.
En 2013, alors qu’elle suit sa formation de licence en Business administration et management à l’Université des sciences médicales et technologiques, elle décide en parallèle d’apprendre à jouer un instrument de musique. Et son choix se porte spontanément sur la basse. En 2014, de voyage en République Démocratique du Congo (RDC), elle achète sa première guitare basse. Ce sera le début d’une longue aventure.
Elle intègre par la suite différents bands où elle joue du jazz, du reggae, du hip-hop sur la basse électrique. En 2017, elle contribue à l’organisation de la première édition du Festival international Karmakol, un rendez-vous culturel qui met en avant la richesse culturelle du Soudan. Elle se produit sur scène avec le célèbre chanteur et auteur-compositeur basé aux Emirats Arabes Unis, Nile. Elle joue ensuite dans un band de fusion de jazz qui se produit chaque semaine dans des restaurants du pays dans le village Assaha, à Khartoum. Elle fait également partie de Sawa Sawa, un band entièrement féminin de musique traditionnelle soudanaise fondé par Zakia Abdul Gassim Abu Bakr, la première femme guitariste du Soudan qui a annoncé en 2021 la sortie de l’album du groupe.
En plus de sa casquette de guitariste, elle est également présentatrice radio sur la Capital Radio 91.9 FM à Khartoum. Elle y anime chaque semaine une émission appelée « Jazzified » et parle de sujets liés au jazz. « Plusieurs Soudanais rejettent le jazz comme étant désuet et ennuyeux. Ma mission comme présentatrice radio est de déconstruire leurs préjugés sur le jazz. Chaque semaine, j’introduis les Soudanais à la richesse mondiale du jazz, du classique au moderne », confie t-elle sur Yamaha.com.
Engagée pour la promotion des droits des musiciennes au Soudan
En tant que guitariste, Islam Elbeiti doit affronter de nombreux obstacles, notamment les préjugés sur la femme. « L’une des forces qui me retiennent à la basse est le préjugé à l’égard des musiciennes que je veux surmonter. Lorsque j’ai commencé à jouer de cet instrument, les gens insinuaient qu’une femme devait jouer quelque chose de plus féminin, comme un piano ou un violon. Mais les instruments de musique ne choisissent pas leurs musiciens en fonction de leur sexe. Pour le prouver, je me suis fixée pour objectif de réussir en tant que bassiste féminine», confie-t-elle au Site Yamaha.com.
Au Soudan, les femmes doivent affronter de nombreux défis, comme les accusations publiques, souligne Islam. « Etre une femme musicienne au Soudan aujourd’hui est plus difficile qu’on ne peut l’imaginer. Plusieurs personnes pensent encore ici que la musique est pour les délinquants. Une femme qui joue s’ouvre à l’oppression sociale constante. Une membre de l’un des bands où je joue a été accusée de « perturber l’ordre social et la décence publique » juste pour avoir porté une tenue de scène qui dessinait son corps », raconte –t-elle sur Yamaha.com
Pour surmonter ces défis, elle fonde en 2019 « Si La Mi », une organisation qui a pour ambition de promouvoir la musique soudanaise et de donner plus de droits aux musiciennes soudanaises. En 2021, elle a également co-fondé le « Sudanese entrepreneurship and innovation network » (SIEN), un réseau d’innovateurs qui a pour ambition de réformer ensemble et de développer l’entreprenariat et les industries innovatrices au Soudan.
En raison de son engagement pour le secteur de la musique au Soudan, Islam Elbeiti a été classée en Janvier 2022 par Avance Media parmi les 100 jeunes Africains les plus influents.