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Cameroun : Arlette Tanga, l’avocate et universitaire qui vulgarise le droit aérien et spatial en Afrique


Depuis quelques années, Arlette Tanga, avocate et universitaire camerounaise, spécialisée en droit aérien et spatial, s’investit activement dans la promotion de ce domaine encore peu connu et pratiqué en Afrique, grâce à l’Association africaine de droit aérien et spatial (AADAS) qu’elle a créée en 2019.

 Enseignante à l’Université de Yaoundé II au Cameroun et avocate au Barreau de Paris, Arlette Tanga exerce dans le droit de l’aviation et de l’espace. C’est grâce à un professeur, raconte-t-elle, qu’elle découvre ce domaine, lors d’un cours sur le droit des transports, alors qu’elle suit des études de Diplôme d’Études Approfondies (DEA) en droit des affaires à l’université de Yaoundé II.

Férue d’avions depuis son enfance, celle qui rêvait de devenir hôtesse de l’air, retrouve sa passion. « Ayant grandi à l’extrême nord du Cameroun, chaque année, nous allions en vacances à Yaoundé par avion. J’étais subjuguée par ce gros appareil, ce qui a nourri mon rêve de devenir hôtesse de l’air. Malheureusement, j’ai été découragée de suivre ce métier… C’est ainsi que durant ma formation juridique à l’université de Yaoundé 2, lors des séminaires d’études et de recherches, j’ai beaucoup apprécié les interventions d’un enseignant sur le transport aérien. Ma seule idée était donc de revenir à ma passion et c’est ainsi que le déclic s’est opéré », explique –t-elle à Africa Women Experts.

Elle décide donc, pour son mémoire de DEA, de travailler sur « la responsabilité du transporteur aérien en cas de catastrophe aérienne » et poursuit avec une thèse de doctorat en droit privé à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne en France intitulée « Essai sur une théorie générale des catastrophes aériennes en Afrique centrale ».

Durant la rédaction de sa thèse, alors qu’elle s’intéresse aux acteurs intervenant dans l’écosystème du transport aérien, elle découvre par la même occasion, le droit spatial qui deviendra également son centre d’intérêt, en tant qu’enseignante chercheure, mais aussi avocate. « Le droit aérien ou droit de l’aviation s’occupe de tout ce qui concerne l’utilisation de l’espace aérien et les activités aéronautiques. Il traite des règles pour la sécurité des vols, les droits des passagers, la régulation des compagnies aériennes, entre autres … », explique- t-elle. Quant au droit de l’espace ou droit spatial, ajoute-t-elle, « c’est une branche du droit international qui établit les règles régissant l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique. Il s’applique à tout ce qui concerne les activités spatiales, qu’il s’agisse de l’envoi de satellites, de l’exploration de planètes ou de la gestion des débris spatiaux. Il veille à ce que les activités spatiales soient menées pour le bénéfice de tous, en promouvant la coopération entre pays et en assurant que l’espace reste un domaine exempt de conflits et accessible à tous sans appropriation par une seule nation ».

Selon la Camerounaise, ces deux disciplines revêtent aujourd’hui une importance particulière en Afrique en raison du rôle croissant de l’aviation dans le développement économique et l’intégration régionale du continent et de la participation de plus en plus active des états africains aux activités spatiales, soit par le lancement de satellites, soit par la contribution à des missions internationales. Avec l’essor rapide des activités aériennes et spatiales sur le continent, souligne-t-elle, ces disciplines offrent de nombreuses opportunités professionnelles aux Africains, allant d’avocats spécialisés pour les compagnies aériennes, les passagers aériens ou les agences spatiales et d’aviation civile africaines, à des postes de conseillers/Consultants juridiques ou de juristes au sein d’organisations internationales telles que l’OACI, l’Agence spatiale africaine, la Commission africaine d’aviation civile et l’Asecna, confie-t-elle. Des carrières qui certes bénéficient aux spécialistes, mais contribuent également au développement de compétences juridiques communes en Afrique.

Une double carrière d’avocate et universitaire

Titulaire d’un doctorat en droit privé et de certificats d’aptitude à la profession d’avocat en France ainsi qu’en conseil juridique et fiscal au Cameroun, délivrés par le Fonds National de l’Emploi du Cameroun, elle commence sa carrière dans l’enseignement en 2010 en tant que chargée de travaux dirigés. Elle est ensuite recrutée comme assistante d’université en 2011. Parallèlement, elle collabore à la création de la faculté des sciences juridiques et politiques de l’Institut International d’Afrique centrale, représenté au Cameroun et au Tchad. Pendant sa thèse en France, elle occupe le poste d’attachée temporaire d’enseignement et de recherche à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ainsi qu’à l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis

Après avoir effectué plusieurs stages dans des cabinets d’avocats spécialisés en droit aérien, notamment chez Chevriers Avocats et Clyde & Co à Paris, elle prête serment en 2020 au Barreau de Paris, où elle exerce actuellement. Elle rejoint ensuite le cabinet Tanga & Co Law Firm à Yaoundé en tant qu’associée. Au sein de ce cabinet, elle pratique outre le droit aérien et spatial, le droit de la consommation, le droit bancaire et du crédit, les procédures civiles et les voies d’exécution, ainsi que le droit de la famille, des personnes et du patrimoine.

Promouvoir les compétences africaines dans le droit aérien et spatial

 En parallèle à sa carrière d’enseignante chercheure et d’avocate, elle s’engage à promouvoir le droit aérien et spatial. Une mission dont elle s’investit suite à sa thèse en France.

En effet, pendant qu’elle effectue ses recherches doctorales, elle est rapidement confrontée à une réalité frustrante : l’accès limité à la documentation et aux travaux existants sur le sujet en Afrique, ainsi que la difficulté à entrer en contact avec les professionnels africains de ce domaine. Elle découvre tout de même peu à peu l’existence de spécialistes africains, mais dont les travaux restent largement méconnus.

Consciente de cette richesse inexploitée, elle fonde, après la soutenance de sa thèse, l’Association africaine de droit aérien et spatial (AADAS) qui « vise à promouvoir le droit aérien et spatial en Afrique, en encourageant la recherche et la formation dans ce domaine, en réunissant les spécialistes du secteur, et en agissant comme un think tank influent pour conseiller les États africains et les acteurs privés », confie-t-elle.

À ce jour, l’association rassemble des spécialistes africains du droit aérien et spatial, issus principalement de l’Afrique anglophone. Elle ambitionne de devenir un acteur de référence en tant que centre d’expertise dans le domaine du droit aérien et spatial en Afrique, fournissant une expertise juridique cruciale aux États africains lors de la conclusion de conventions importantes et des conseils aux acteurs privés et aux chercheurs africains.

Des activités ciblant les acteurs clés, mais aussi les citoyens

En mai 2021, dans le cadre de ses activités, l’AADAS organise en collaboration avec la Direction de l’éducation, des sciences, de la technologie et de l’innovation de la Commission de l’Union africaine, une conférence en ligne sur «l’état des politiques et la réglementation des activités spatiales en Afrique ». Elle participe également chaque année au «NewSpace Africa Conference», l’événement phare regroupant les principaux acteurs du spatial en Afrique. Dans le domaine aérien, elle organise en novembre 2021 une conférence en ligne sur les aspects juridiques de la promotion du tourisme intracontinental. En partenariat avec le Réseau International des Femmes avocates (RIFAV), elle lance en 2022 une série de masterclasses sur le droit des transports. Depuis 2023, l’ONG collabore avec différentes institutions clés du secteur de l’aviation civile en Afrique pour sensibiliser les passagers sur leurs droits. Un projet réalisé avec succès pour les États d’Afrique centrale et en cours d’exécution dans les pays d’Afrique de l’Ouest.

Pour l’avocate et universitaire camerounaise, « il est essentiel que les pouvoirs publics s’approprient ces disciplines afin d’en tirer le meilleur parti et d’en faire bénéficier les acteurs tant du secteur privé que public, mais aussi que les citoyens soient informés sur leurs droits en tant que passagers, notamment dans les cas de retard ou d’annulation de vol, de perte de bagages et autres abus ».

 Aujourd’hui, Arlette Tanga ambitionne de créer un laboratoire de recherches en Afrique sur le droit aérien et spatial, mais aussi de faire de son cabinet un leader dans ce domaine en Afrique francophone et d’inciter davantage de femmes africaines à s’engager dans ces branches juridiques. En faisant le pont entre l’enseignement et la pratique juridique, elle œuvre à transformer le paysage du droit aérien et spatial en Afrique, promouvant à la fois l’expertise locale, mais aussi l’intégration des femmes dans ce secteur.

 

Danielle Engolo